Aller au contenu principal

Les experts 4

26 janvier 2012

Déontologie de l’expertise médicale

Nous donnons ici les éléments essentiels de la déontologie de l’expertise.

Un dernier volet de cette série récapitulera les préconisations essentielles du CNOM.

D’ici la fin de l’année le CNOM se prononcera sur un certain nombre de questions pratiques relatives à cette pratique.

Dans le domaine de l’évaluation du dommage corporel, le rôle du médecin n’est ni de soigner ni de tenter de guérir un patient, mais de faire des constatations médicales en vue de l’établissement d’une preuve, d’un lien de causalité entre une cause génératrice de dommage et les conséquences corporelles de ce dommage.

Le médecin agit ici soit comme expert au titre d’auxiliaire de justice, soit comme assistant technique à la demande des services d’indemnisation des assurances et/ou à la demande des victimes.

Une double déontologie, à la fois juridique et médicale, doit impérativement être observée.

Sur le plan déontologique, tous ces médecins sont évidemment soumis au code de déontologie médicale dont ils doivent respecter tous les articles, et en particulier les articles 105 à 108, qui traitent de la médecine d’expertise et s’appliquent entre autres à l’évaluation du dommage corporel.

L’élément essentiel est le respect du secret professionnel.

Il est général et absolu.

Les principes:

– Selon l’article 1315 du code civil (« Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver »), il appartient à la victime de démontrer que les séquelles présentées sont imputables de manière directe et certaine au fait générateur du dommage. Cette preuve est ici apportée par l’expertise, qu’elle soit judiciaire ou amiable.

– Le secret médical, droit du patient, ne lui est pas opposable : le patient est maître du secret

– Dans le code de déontologie, les articles qui traitent du secret sont en particulier les articles 4, 7, 73, et 104, et dans les articles dédiés à la médecine d’expertise, l’article 105 traite des conflits d’intérêt et les articles 106, 107, 108, du secret.

La pratique

L’expert judiciaire doit rester dans le cadre strict de la mission qui lui est confiée par les différentes juridictions.

L’expert doit avoir communication du dossier, sauf si le blessé y faisait opposition, mais dans ce cas le tribunal tirerait les conclusions de ce refus.

Pour mener à bien sa mission, l’expert judiciaire doit avoir connaissance de l’ensemble des éléments nécessaires à cette mission, il obtient ces éléments par voie d’avocat qui s’appuie sur la victime directement et sur tous les intervenants ayant eu à la prendre en charge.

L’expert ne devra faire état cependant que des éléments utiles à l’accomplissement de sa mission.

L’expert n’a pas de secret pour le juge dans les limites de sa mission, sur les points d’ordre médical.

Par exemple, les antécédents qui n’ont pas d’interaction avec le dommage subi ne doivent pas être révélés.

Dans la rédaction du rapport, l’expert doit taire ce qui est sans rapport avec sa mission.

Les médecins conseils d’assurances doivent en tout état de cause en référer à leur mandant, que ce soit en défense (assurance du responsable, la mission provient de la compagnie débitrice de l’indemnisation) ou en recours (assurance de la victime).

Le respect des règles de la déontologie médicale pour eux aussi est absolu, toute fraude doit être sanctionnée

C’est à la victime de fournir à ces médecins les éléments nécessaires.

En particulier, en aucun cas le médecin conseil d’assurance ne peut se procurer des éléments du dossier à l’insu de la victime.

Il lui est formellement interdit, notamment, d’aller consulter un dossier hospitalier ou de s’entretenir avec un médecin ayant traité la victime, sans l’accord écrit de celle-ci.

Du côté du médecin conseil de victimes, et de la victime elle-même, il leur appartient de fournir les éléments probants qui permettront la juste, et totale, évaluation du dommage corporel subi.

Bien entendu, il ne saurait y avoir dissimulation ou fabrication de preuves, et un dossier ne saurait être tronqué, partiel ou partial.

La compétence est une obligation déontologique, qui s’applique bien évidemment ici.

Le CNOM demande que l’expert judiciaire ou le médecin conseil d’assurances reste dans le domaine de sa qualification .

Le respect du contradictoire est également fondamental dans le domaine de l’évaluation du dommage corporel

Que ce soit dans l’expertise médicale judiciaire ou dans l’expertise amiable, il s’impose au médecin missionné pour tout ce qui concerne sa mission d’expertise

En matière judiciaire

– Lors de la constitution du dossier, le respect du contradictoire impose que les différentes pièces du dossier soient intégralement communiquées à toutes les parties par les avocats.

La remise du dossier ne peut se faire qu’avec l’accord du patient, et non à son insu.

– Au cours de la réunion expertale contradictoire, en présence des parties et de leurs conseils, là encore l’échange d’informations doit se faire dans le respect du secret.

L’examen médical se fait habituellement en présence des seuls médecins, avec l’accord du blessé.

La victime peut demander que seul l’expert soit présent, ou a contrario imposer la présence de son avocat ou de la personne de son choix.

– En fin de réunion se tient en général la discussion, qui doit bien sûr se faire en présence de toutes les parties, qui ont le droit d’y assister.

La pratique du pré-rapport permet de laisser un temps de réflexion à l’expert, à la condition bien entendu qu’il soit communiqué à toutes les parties.

Il ne doit pas y avoir de discussion en l’absence d’une des parties.

En fin de réunion, tous les participants doivent quitter ensemble le cabinet de l’expert sans qu’il y ait le moindre aparté.

L’expert judiciaire ne saurait indiquer être parvenu à un accord entre les parties : il n’a pas pour mission de les concilier. Si toutefois un consensus s’est dégagé, l’expert doit signaler que ses conclusions ont été prises avec l’accord des parties.

Dans le cadre de l’article 281 du NCPC, l’expert judiciaire est tenu de prendre acte de l’accord des parties et de l’entériner.

En matière amiable, les règles sont évidemment les mêmes.

L’aspect contradictoire ne peut pas vraiment être respecté si la victime n’est pas assistée par un médecin conseil spécialisé.

L’indépendance de l’expert

Il n’y a pas d’expertise judiciaire juridiquement valable sans indépendance absolue de l’expert, condition indispensable de son impartialité.

Les médecins conseils sont des assistants techniques, chargés de défendre la position de la partie qu’ils assistent dans une discussion technique.

Ils ne sont pas mandataires de cette partie et leurs dires doivent être présentés ou contresignés par l’avocat ou le mandant.

Pour autant, ils doivent bien entendu conserver leur objectivité scientifique et technique.

Le médecin conseil d’assurances, que ce soit en défense (assurance du responsable, à qui incombe le devoir d’indemnisation) ou en recours (assurance de la victime,) peut se trouver au cœur d’un conflit d’intérêt entre la victime et l’assurance débitrice de l’indemnisation.

Lorsqu’il est missionné comme assistant technique dans une expertise judiciaire, il doit défendre les intérêts de la compagnie qui le missionne.

Lorsque c’est lui qui réalise un examen amiable, il est explicitement mandaté par l’assureur dont il est le conseil technique.

La note technique confidentielle qu’il rédige en fin de rapport n’est en général pas communiquée à la victime.

Sa mission est celle établie par l’AREDOC, organisme créé et alimenté par les assureurs et structuré en société savante.

Ce médecin doit donc veiller à ce que son indépendance ne soit pas remise en question.

Le médecin conseil de victimes agit pour le blessé, comme un médecin traitant en quelque sorte, et doit tenir compte des seuls intérêts du patient (article 46).

Pour autant il doit bien évidemment rester totalement clair, loyal, intègre et indépendant.

Nous l’avons vu, intégrité et objectivité sont des qualités universelles que chacun de ces médecins doit présenter.

Enfin, le respect dû à la personne s’impose à tous, et ces médecins, même s’il ne leur est pas demandé de soigner, ne doivent pas l’oublier.

One Comment
  1. Lehay elisabeth permalink

    Bonjour,
    Après une expertise médicale judiciaire,pourquoi n’y a t-il pas de réponse d’un juge qui ,en une simple lecture du dossier medical peut constater les falsifications de ce dossier médical par l’expert,la disparition d’une partie du dire apportant les preuves de la faute medicale,les conclusions de l’expert contraire à la loi du 4 mars 2002,la création d’un chirurgien sensé avoir remplacé le chirurgien en vacances et supposé avoir assuré la surveillance et la disparition pure et simple du chirurgien qui a constaté la pathologie mais n’a fait ni investigation ni mis en place le traitement approprié ?

Laisser un commentaire